Le mythe de la semaine des 40 heures

Frederik Anseel, professeur en psychologie des organisations à l’Université de Gand, remet en cause l’hypothèse selon laquelle le résultat fourni est directement proportionnel aux heures de travail.
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La récente conclusion du budget n’a suscité l’enthousiasme de personne. Dans la communication, on a surtout souligne les catastrophes effroyables qui nous sont épargnées. Un de ces scénarios catastrophes aurait été un retour à la semaine des 40 heures. Un employeur a résumé cette idée concrètement. « Travailler 2 heures de plus par semaine pour le même salaire ou mettre la main à la pâte 20 minutes par jour en plus, ce serait un pas important pour refouler le handicap sur les coûts salariaux. »

On part de l’idée qu’il y a un rapport d’un sur un entre le nombre d’heures de travail et le produit fourni. D’un point de vie rationnel et économique, cela se tient, mais cela relève d’une perspective psychologique un peu pauvre. Quand il faut prester plus d’heures de travail, le nombre d’heures réellement productives chute.

Il y a dans l’histoire deux moments de changement drastique en termes d’heures de travail. Pendant la seconde guerre mondiale, le gouvernement britannique veut booster la production d’armes de guerre. En soutenant le patriotisme auprès des ouvriers, on décide dans plusieurs fabriques d’armes d’augmenter le nombre d’heures de travail de 56 à 69 heures. Qu’observe-t-on après un certain temps ? La production chute de 12% sous le niveau de départ. Pendant cette semaine de 69 heures on travaille en fin de compte 51 heures alors que dans celle des 56 heures on en preste en réalité 53.

Second cas intéressant lors de la Grande Dépression des années 30 aux Etats-Unis. Pour survivre pendant la crise, sans devoir licencier de travailleurs, une série d’entreprises réduisent drastiquement leur semaine de travail. Elles constatent en réalité que la production ne diminue pas proportionnellement. Une fabrique observe ainsi qu’une réduction de 9 heures ne conduit qu’à une baisse effective de 5 heures de travail. Les collaborateurs éprouvent même un certain équilibre grâce au nombre d’heures qu’ils prestent.

Les Belges ne travaillent peut-être pas beaucoup mais sont, pendant ces heures limitées, très productifs. L’augmentation du nombre d’heures de travail peut même mener à une diminution de la productivité.

Le réel problème est que nous continuons dans notre société de la connaissance à exprimer le travail en nombre d’heures. Le temps n’est pas le meilleur critère possible pour mesurer le résultat. Le nombre d’heures pendant lesquelles l’on est présent au bureau n’indique en rien la qualité du travail, ni son efficacité, son innovation, son orientation client. Le contrôle du temps est un héritage dommageable de la seconde révolution industrielle qui assimile encore à l’image idéale du travail un job 9-5. Nous devons tout doucement prendre de la distance face à cela.

« Working nine to five. What a way to make a living », dixit la chanteuse américaine. Travailler de 9 à 5, quelle drôle de manière de gagner sa croûte !

7 décembre 2012

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