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Les syndicats

Gréviste, tout vous est permis ?

Une grève génère souvent manque de clarté et insécurité chez les travailleurs et les employeurs. A quels droits et devoirs chacun est-il tenu ?
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« Les hommes ont le droit de faire grève, ou autrement dit, de ne pas travailler », nous dit Kris De Schutter du bureau d’avocats Loyens & Loeff, spécialisé en droit du travail. « C’est un droit fondamental octroyé par la législation européenne et le tribunal européen. On ne peut donc pas le mettre en doute. Les grèves peuvent entrainer une certaine charge chez l’employeur. C’est un moyen de pression et cela va évidemment toucher l’entreprise sur le plan économique. Mais la charge de la grève doit rester dans des limites raisonnables. On ne peut abuser de ce droit. »

Ce qui est important, c’est que les droits des autres travailleurs soient préservés. Ils ont tout autant le droit de travailler, on ne peut le restreindre. « Parfois, les lieux de travail sont bloqués pour que personne ne puisse venir prester et c’est plus qu’un ‘pont trop loin’ », explique Kris De Schutter. « Les travailleurs doivent pouvoir rentrer et ressortir aussi. En occupant les lieux de telle manière que le management ou les équipes de nuit ne peuvent plus ressortir, on repousse les limites de ce qui est autorisé en matière de droit de grève. On pourrait en déduire que tout obstacle aux autres travailleurs n’est pas permis, mais cela ne se passe pas ainsi. Sinon la SNCB, par exemple, ne pourrait jamais faire grève. »

Grèves spontanées ou sauvages

En principe, les grèves sont annoncées un peu à l’avance, même si parfois on organise des actions spontanées ou sauvages. L’effet pour l’employeur est pour ainsi dire le même. En ce qui concerne le remboursement des travailleurs grévistes par la caisse de grève du syndicat, il y a aussi peu de différence, à condition que l’action soit reconnue par ce dernier.

« Un conflit social nécessite que l’on recourt aussi tôt que possible à la concertation », poursuit Kris De Schutter. « La grève est le dernier recours si toutes les pistes ont échoué. A moins d’une annonce soudaine, à forte charge émotionnelle, comme un licenciement collectif. Les syndicats font partie de la concertation sociale et les grèves sauvages rendent les futures négociations tout bonnement plus difficiles. »

Salaire

Lorsqu’on fait grève, il y a des règles spéciales à respecter pour être rémunéré. Celui qui fait grève n’est pas payé. Les membres du syndicat peuvent faire appel à la caisse de grève, à condition que le syndicat reconnaisse l’action. Les non membres ne reçoivent pas d’indemnité. Pour les travailleurs volontaires, c’est un autre discours. Celui qui tient à travailler dans une entreprise engagée dans une grosse action de grève, n’a en principe pas droit à son salaire mais peut sous certaines conditions recevoir une indemnité de l’ONEM.

Lors des grèves en dehors de l’entreprise, c’est toute autre chose. Quand on veut travailler mais qu’on ne peut se rendre sur son lieu de travail pour cause d’action dans les transports publics, on a droit au salaire garanti, à condition que la grève ne soit pas annoncée. Si on le sait à l’avance, on est supposé prendre des mesures pour arriver au travail. Lors de la grève du 30 janvier dernier, les travailleurs étaient prévenus et ont donc pu en tenir compte.

Barrages

Et que se passe-t-il lorsque les syndicats bloquent comme lundi certaines sorties d’autoroute, des carrefours ou l’accès aux entreprises ? Kris De Schutter : « Alors le tribunal peut prendre des mesures à très court terme et sur demande unilatérale, après quoi un huissier est envoyé sur place dans les deux heures pour lever le barrage. Celui qui refuse de partir risque l’astreinte. Il s’agit ici de grévistes individuels. On ne s’adresse pas aux syndicats eux-mêmes qui, pour des raisons historiques, ont une personnalité juridique limitée. »

(bvdb/sc)

2 février 2012
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