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Ouvriers et employés : du pareil au même aujourd’hui ?

Les statuts des ouvriers et des employés ont été alignés, c’est ce qu’ont clamé de nombreux messages triomphants début juillet. Mais à présent que le processus est en cours, l’égalité ouvriers et employés semble encore loin de la réalité.
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Un compromis a certes été conclu mais uniquement sur deux points importants, le jour de carence et le délai de préavis. Sur toutes les autres inégalités (soit 10 points), les partenaires sociaux doivent encore commencer à discuter. Cela fait plus de 20 ans que l’on remet en cause la distinction entre ouvriers et employés, parce que selon certains, c’est tout simplement archaïque et discriminant.

Un statut unique pour tous les travailleurs était une réelle exigence lorsque la Cour Constitutionnelle a rendu son verdict. Le deadline fixé pour une harmonisation des statuts est désormais passé : le 8 juillet 2013, nous devions passer au statut unique.

Pas de véritable accord entre partenaires sociaux

La confiance ne semble pas encore d’être installée entre les syndicats et les organisations des employeurs : « Mais c’était sans compter sur l’avis des autres, dans ce cas-ci, Monica De Coninck, Ministre du Travail », explique Koen Magerman, expert juridique senior chez SD Worx. « Avec une persévérance et une conviction plutôt rares, De Coninck a réussi à mobiliser les partenaires sociaux afin qu’ils acceptent un projet de compromis (ou autrement dit, afin qu’ils ne s’y opposent pas violemment). Le compromis a été rédigé par le ministre avec les avis de part et d’autre. Il contient des éléments dans lesquels chacun des partenaires peut s’y retrouver, mais il n’y a pas d’accord entre partenaires sociaux pour autant. Ce qu’ils ne peuvent désormais plus faire non plus : négocier et arriver à un consensus », explique Koen Magerman.

Toujours pas de statut unique pour ouvriers et employés

Le compromis qui est sorti juste avant le 8 juillet a été présenté comme si le statut des ouvriers et des employés avait été harmonisé. Mais il n’en est rien. « Le compromis se concentre uniquement sur les deux points que la Cour Constitutionnelle a déclaré explicitement anticonstitutionnels : le jour de carence et les délais de préavis. Là-dessus, un compromis général a été signé, sans aucune valeur juridique ou contraignante. Les modalités pratiques de la loi doivent seulement être définies, ce qui signifie que d’ici-là, les changements n’entrent toujours pas en vigueur », précise Koen Magerman.

Vraisemblablement plus tard qu’en janvier 2014

Sur tout le reste (les quelques 10 points ci-dessous), l’inégalité subsiste encore toujours entre ouvriers et employés. Les partenaires sociaux doivent seulement entamer les discussions. Il faudra donc attendre l’automne pour voir si les compromis nécessaires peuvent être conclus.

Les messages victorieux du gouvernement début juillet, évoquant le statut unique comme un fait, joyeusement repris par les média, sont pour le moins hâtifs. « Le plus gros du travail doit donc encore démarrer. Je suis curieux de savoir si les partenaires sociaux vont cette fois trouver un compromis. Que le nouveau statut unique puisse démarrer à partir du 1/1/2014 ne me semble pas non plus évident » détaille Koen Magerman de SD Worx. « La perspective des élections du 25 mai 2014 n’améliore pas les choses, il va être particulièrement difficile de détourner les pensées des dirigeants politiques des élections et d’attaquer les volets technico-juridiques. La participation des partenaires sociaux dans ce processus soulève encore également des points d’interrogations. »

Les travailleurs peuvent aller en justice

Les ouvriers et employés qui se sentent défavorisés peuvent entamer une action en justice. Les ouvriers peuvent par exemple exiger des indemnités de préavis plus élevés ou les employés une période d’essai raccourcie. « Mais il est loin d’être évident de devenir quel sera le jugement que le juge prononcera. Ce n’est pas cela qui alignera automatiquement ouvriers et employés, l’inverse est juridiquement tout à fait possible… La Cour Constitutionnelle a annulé les articles de loi sur le préavis et le jour de carence mais n’a encore fait qu’appel au législateur pour les adapter. Ils existent donc toujours. Un juge ne peut certainement pas mettre ainsi de côté ces règles existantes », détaille Koen Magerman.

Ouvriers et employés sont égaux

Les 4 points suivants entrent en vigueur au plus tôt le 1/1/2014, après modification des lois nécessaires.

1. Le jour de carence est supprimé
Ce qui signifie que la période de salaire garanti commence pour tout le monde le premier jour de maladie. Les secteurs pourraient encore en fixer les modalités. Qu’est-ce que cela signifie ? Ce n’est pas encore clair. C’est surtout une bonne nouvelle pour les ouvriers : en cas d’incapacité de travail de moins de 14 jours calendrier, le premier jour de maladie n’est en principe pas payé jusqu’à présent. Mais dans 96 secteurs ouvriers, il existe déjà bel et bien un règlement qui stipule que le premier jour de maladie est déjà bel et bien payé, en tout ou en partie.

Le contrôle médical serait aussi renforcé. En outre, le salaire du premier jour de maladie devrait être exonéré de cotisations sociales.

2. Les délais de préavis sont revus de manière drastique
En principe, les délais de préavis pour les ouvriers et les employés sont entièrement harmonisés à partir du 1er janvier 2014. Les délais de préavis seront donc calculés en semaines.

Les deux premières années, le délai se construit progressivement, par trimestre. Bien que le compromis ne l’indique pas, nous supposons que les délais de préavis seront prolongés par tranche entamée de 3 mois. Après 30 ans, cela donne un délai de préavis de 72 semaines (ce qui fait environ 16,6 mois), comme maximum légal. C’est une réduction considérable des délais de préavis pour les employés supérieurs et un allongement pour les ouvriers. Après la mise en vigueur des nouveaux délais de préavis les nouvelles règles seront aussi d’application sur les contrats de travail existants, mais en respectant bien ce qui a été construit auparavant. Mais la formule Claeys, par exemple, quoique fort utilisée, n’est pas reconnue comme ‘règle existante’ et ne devra donc pas être respectée, il s’agit juste d’un instrument fort utilisé pour arriver à un délai de préavis correct pour les employés.

3. Licenciement abusif
Cela sera dissolu lors de l’harmonisation des délais de préavis des ouvriers et employés. Un licenciement devra désormais être motivé, même pour les employés. Le droit sur le licenciement est modernisé par la même occasion.

D’un autre côté, la protection spécifique contre le licenciement des ouvriers – l’interdiction de licencier de manière aléatoire – est supprimée.

4. Outplacement obligatoire
L’outplacement sera rendu obligatoire pour tous les travailleurs, et son coût pourra être partiellement calculé sur les nouveaux délais (ou indemnités) de préavis. D’autres mesures sont possibles pour rendre plus aisément supportables les coûts de licenciement plus élevés.

Ouvriers et employés encore toujours inégaux

Encore aucun compromis n’a été atteint sur les points suivants.

  Ouvriers Employés
Période d’essai   7 à 14 jours prolongés de la durée des périodes de suspension, jusqu’à maximum 21 jours. 1 à 12 mois (maximum 6 à 12 mois selon la hauteur du salaire) allongés de la durée totale des suspensions.
Rupture du contrat de travail pendant la période d’essai   Pendant les 7 premiers jours de l'essai : la rupture n'est autorisée qu'en cas de motif grave ou par accord mutuel (confirmation écrite)

Après les 7 premiers jours : on peut y mettre fin immédiatement à la fin de chaque journée de travail, sans préavis ni indemnité.
Après 7 jours d’incapacité : interruption sans préavis ni indemnités possibles.

Pendant le 1er mois : préavis de 7 jours calendrier.

Attention : le préavis ne peut prendre cours au plus tôt que le dernier jour du premier mois.

Après le 1er mois et pendant toute la période d'essai : préavis de 7 jours calendrier.

 
Début du délai de préavis   Le lundi suivant le jour où la lettre de préavis est présumée avoir été reçue.

 
Le 1er jour du mois qui suit le jour où la lettre de préavis est présumée avoir été reçue.

 
Contre préavis   La moitié du délai de préavis que l’employeur doit respecter. 1,2 ou 4 mois selon la rémunération de l'employé.
Versement de la rémunération   Minimum 2 fois par mois avec un intervalle de 16 jours maximum (paiement d’une avance).

 
Mensuel.
Salaire garanti en cas d’incapacité

 
Salaire garanti pendant 7 jours
(+ jour de carence si moins de 14 jours d’incapacité). Mais par CCT du Conseil National du Travail, étendu à une sorte de salaire mensuel garanti)
Rémunération normale pendant 30 jours (sans jour de carence)

 
Chômage temporaire   Versement d’une indemnité de chômage temporaire avec éventuellement en plus de l’indemnité de chômage, une indemnité complémentaire du fond de sécurité et d’existence de l’employeur.

Attention: dans certains secteurs, la durée de chômage économique est fixée par arrêté royal.

Le chômage temporaire pour cas de force majeure est possible tant pour les ouvriers que pour les employés.
Depuis 2012, le chômage temporaire pour employés pour cause de manque de travail est possible, mais seulement dans les entreprises qui sont formellement en difficultés.
Pécule de vacances   Payé par la caisse de vacances.

Calculé sur l’entièreté du salaire perçu l’année précédente.
Payé par l’employeur.

Calculé sur le salaire du mois pendant lequel les congés sont pris.

 
Cotisations patronales de sécurité sociale   +/- 38,38% sur 108 % du salaire brut.
(108% parce que l’employeur paie ainsi les cotisations pour le pécule de vacances)

Attention, les cotisations patronales peuvent varier d’un secteur à l’autre, cela dépend des cotisations complémentaires pour le fonds social. Par exemple dans le secteur de la construction, elles sont de 13 à 15% alors que dans l’horeca, elles sont seulement de 1,40 à 1,45%.

 
+/- 32,38% du salaire brut.

Attention, aussi ici des cotisations complémentaires pour le fond social sont prises en compte et peuvent varier d’un secteur à l’autre.
Cotisations personnelles de sécurité sociale

 
13,07% sur 108% du salaire brut. 13,07% du salaire brut.

(Dernière mise à jour : 31/07/2013) 

Les principales différences entre ouvriers et employés sont listées ci-dessus. Mais il y en reste de nombreuses, par exemple en matière de droit du travail collectif (la plupart des secteurs sont divisés en employés et en ouvriers, qui concluent des CCT distinctes). A voir si sur chacune de ces différences, un compromis va pouvoir être trouvé dans le nouveau statut unique.

(mr/sc) - Avec nos remerciements à SD Worx. 

9 août 2013
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